PDGFA, un facteur de croissance qui lie la maladie du soda et le diabète

La maladie du soda touche six millions de français. Liée à l’obésité et au diabète, elle entraine une maladie hépatique souvent gravissime appelée NASH (nonalcoholic steatohepatitis) pouvant évoluer vers la greffe du foie et le cancer. Un consortium européen vient de publier un article dans le journal Diabetes, démontrant un lien épigénétique hépatique entre le diabète et le NASH qui passe par la surproduction d’un facteur de croissance hépatique, toxique à haute dose, appelé PDGFA.

Pour arriver à cette conclusion, les chercheurs ont étudié le statut épigénétique (dans ce cas, la méthylation) de l’ADN du foie de 100 femmes obèses à la glycémie normale et 100 femmes obèses diabétiques. Parmi les 450 000 régions du génome analysées, une seule présentait un taux de méthylation beaucoup plus bas chez les femmes diabétiques par rapport aux femmes témoins. Cette région génomique correspond à celle du facteur de croissance fœtale clé du foie appelé PDGFA (Platelet-Derived Growth Factor-A). Les chercheurs ont montré que l’hypométhylation de ce site génomique était associée à une augmentation importante de l’expression de ce gène dans le foie des patientes diabétiques. En réalisant ensuite une analyse génétique chez toutes les patientes, ils ont démontré que c’est la résistance à l’insuline (et non la glycémie élevée ou le taux élevé de lipides sanguins) qui est responsable de l’hyperproduction hépatique de PDGFA.

Pour mieux comprendre ce qu’il se passe dans le foie des patientes diabétiques obèses, les chercheurs ont utilisé des modèles cellulaires et animaux de la maladie du soda liée au diabète. Ils ont pu montrer que les rongeurs prédisposés à l’obésité, au diabète et à la maladie hépatique présentaient une hyperproduction de PDGFA. Cette hyperproduction, suite à la dérégulation épigénétique provoquée par l’insulino-résistance, a deux effets dévastateurs pour le foie : d’une part elle aggrave la résistance à l’insuline des cellules hépatiques et en perturbe la fonction ; d’autre part elle exacerbe sa propre production. Enfin, ce facteur de croissance provoque une fibrose hépatique, première étape vers la cirrhose du foie.

Cette étude dirigée par le Pr. Philippe Froguel, impliquant le CNRS, l’Université de Lille, l’Institut Pasteur de Lille, Imperial College London, l’Inserm, le CHU de Lille, et des chercheurs suisses et allemands, montre l’effet pervers et précoce de la résistance à l’insuline de l’obésité et du diabète sur le développement du NASH. Elle ouvre aussi de nouvelles pistes de recherche vers des traitements contre le diabète: en effet, il existe des inhibiteurs du récepteur du PDGFA, qui utilisés dans certains cancers, ont des effets très positifs et inattendus sur le diabète de patients cancéreux qui en ont bénéficié.

Enfin, ce travail illustre l’utilité des études épigénétiques humaines pour avancer vers la nouvelle médecine de précision du 21ème siècle.

© Philippe Froguel

Source : http://www.cnrs.fr/insb/recherche/parutions/articles2018/p-froguel.html

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