L’impact de la composition génétique sur les niveaux d’insuline sanguine chez les hommes et les femmes a été identifié pour la première fois, dans la plus grande étude internationale jamais conçue pour ce type de problème.
En publiant leurs conclusions dans la revue Nature Communications, les chercheurs de l’Université de Surrey, VIB-KU Leuven, l’Université de Lille et plusieurs autres institutions, dans le cadre du consortium MAGIC (Meta-analysis of Glucose and Insulin-related traits Consortium), ont examiné les variations dans l’ADN de 151 188 européens non diabétiques, afin de déterminer si la génétique influe sur les différences observées entre les sexes quant à la capacité de l’organisme à gérer le taux de sucre et d’insuline dans le sang.
Des taux de sucre (glucose) sanguin élevés sont observés lorsque le pancréas n’est pas capable de produire des quantités suffisantes d’une hormone, l’insuline. Lorsque de tels dérèglements du taux de sucre se produisent, en particulier lorsqu’ils sont associés à un poids corporel plus élevé ou à l’obésité, les cellules des autres tissus du corps peuvent ne pas réagir à l’insuline et devenir résistantes à l’insuline.
Le professeur Inga Prokopenko, de l’université du Surrey, qui dirige l’étude, a déclaré : « Il est important de comprendre les causes des différences entre les sexes en matière de glucose et d’insuline à jeun, car ces deux éléments indiquent comment notre corps réagit naturellement au sucre dans le sang. Un métabolisme du glucose perturbé peut conduire au diabète de type 2 et d’autres maladies qui peuvent être évitées. »
Des recherches antérieures ont montré que les hommes sont plus nombreux que les femmes à avoir un taux de sucre dans le sang plus élevé lorsqu’ils sont à jeun. Les femmes, quant à elles, sont plus susceptibles d’avoir des problèmes de tolérance au glucose, ce qui signifie que leur corps ne traite pas assez le sucre dans le sang après avoir mangé. Toutefois, on ne sait pas si des facteurs génétiques jouent un rôle dans ces différences.
« Nous avons identifié des variants d’ADN qui diffèrent par leur effet sur les niveaux d’insuline à jeun selon le sexe. Par exemple, les variants du gène IRS1 ont un impact plus important chez les hommes que chez les femmes, tandis que d’autres variants du gène ZNF12 ont un effet important sur la résistance à l’insuline chez les femmes, et aucun effet détectable chez les hommes », explique le docteur Vasiliki Lagou, chercheur au VIB et à la KU Leuven.
Le professeur Prokopenko souligne « Il s’agit d’un excellent effort international dans ses approches et ses résultats analytiques, qui ouvre la voie à de futures études sur les différences liées au sexe dans les caractéristiques et les maladies humaines. »
Statistiques et big data humain
Le Docteur Marika Kaakinen de l’Université de Surrey met en avant la méthodologie appliquée à l’étude, réutilisable pour la postériorité : « Si cette étude fournit des indices au niveau génétique sur les différences de taux de glucose et d’insuline entre les hommes et les femmes, sa méthodologie guide également les futures études qui pourront appliquer un processus similaire. Une taille d’échantillon encore plus importante serait souhaitable, cela devient de moins en moins compliqué avec la disponibilité croissante de données provenant de grandes biobanques ».
Des liens cachés
Les chercheurs ont également découvert qu’un rapport taille/hanches plus élevé chez les femmes, appelé également accumulation de graisse abdominale, les rend résistantes à l’insuline, ce qui peut entraîner le développement du diabète de type 2.
Les résultats de cette étude ont également conduit les chercheurs à penser que l’obésité abdominale chez les femmes pourrait contribuer au développement d’autres maladies dont l’insulinorésistance est un symptôme, comme le syndrome de Stein-Leventhal (des ovaires polykystiques) ou la stéatose hépatique (maladie du foie gras).
Il a également été découvert qu’une forte maigreur (anorexie) est génétiquement inversement corrélée aux niveaux d’insuline à jeun et, là encore, cette relation est plus forte chez les femmes que chez les hommes.
Le docteur Lagou poursuit : « Cette étude vient s’ajouter aux preuves de plus en plus nombreuses que la génétique contribue aux différences entre les deux sexes dans les processus physiologiques normaux et dans les changements conduisant à des maladies chroniques, au-delà de celles provoquées par les hormones sexuelles et les expositions environnementales. »
Le professeur Inga Prokopenko déclare : « Plutôt que d’adopter une approche unique pour la conception des plans de traitements et des mesures préventives prises pour arrêter le développement d’une maladie, il convient de prendre en considération le sexe et la composition génétique individuelle. »