Repenser l’obésité à travers le prisme des troubles neurologiques et psychiatriques

Pendant des décennies, l’obésité a souvent été considérée comme un simple déséquilibre entre l’apport calorique et les dépenses énergétiques. Cependant, les avancées récentes dans les recherches génétiques et neurologiques de personnes en situation d’obésité révèlent une histoire bien plus complexe. Il est temps de redéfinir l’obésité, non seulement comme un trouble métabolique (qui évolue en diabète, maladies hépatiques et cardio-vasculaires et certains cancers), mais, surtout à l’origine, comme une condition profondément interconnectée avec la fonction cérébrale et la santé mentale et cognitive. Dans une revue publiée dans Molecular Psychiatry l’équipe lilloise du Prof Philippe Froguel (INSERM, CNRS, Institut Pasteur de Lille et Université de Lille) montre la nécessité d’aborder l’obésité sous un angle neurologique et psychologique, nous incitant à repenser les causes mais aussi les prises en charge de cette condition complexe.

Plus de 20 gènes sont désormais identifiés comme acteurs clés de l’obésité monogénique à début précoce (qui touche entre 10 et 50% des obésités sévères à début précoce selon les pays, tandis que plus de 1000 régions du génome sont associés aux formes communes polygéniques. Les individus porteurs de mutations dans ces gènes rencontrent fréquemment des difficultés neurodéveloppementales, soulignant la relation directe entre les circuits cérébraux et la régulation du poids corporel. Cette connexion est particulièrement évidente dans l’obésité monogénique, où nos recherches antérieures ont montré que les mutations dans la voie de la leptine-mélanocortine (qui régule l’appétit) perturbent le contrôle du poids et en même temps altèrent les fonctions cognitives telles que la prise de décision, la mémoire et l’apprentissage.

Par ailleurs, les gènes régulant le poids en cause dans l’obésité commune sont souvent exprimés dans les régions du cerveau liées à l’addiction, à la réponse au stress et à la « récompense, soulignant la composante comportementale de l’obésité et de ses addictions alimentaires.  Des traitements récemment proposés ou émergents offrent un nouvel espoir, non seulement pour la gestion du poids, mais aussi pour le traitement des symptômes cognitifs et neurocomportementaux souvent associés. Ces découvertes mettent en lumière l’urgence d’approches de médecine de précision plus personnalisées ciblant à la fois les dimensions physiques et cognitives de cette condition qui touchera bientôt plusieurs milliards de personnes dans le monde.

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