Prof. Anne Vambergue

Prof. Anne Vambergue

Service d’Endocrinologie Diabétologie, Métabolismes Nutrition du CHU de Lille.

Aujourd’hui, le Professeur Anne Vambergue nous parle de ses projets au sein de PreciDIAB et des avancées concrètes pour les patients diabétiques.

Pouvez-vous nous expliquer ce qui vous a amenée à vous spécialiser dans la diabétologie et l'intérêt pour vous de combiner le soin et la recherche?

Je me suis très rapidement orienté au cours de mon cursus d’interne vers la diabétologie même si j’ai acquis une formation d’endocrinologue. La particularité de la diabétologie est d’être une spécialité au carrefour de nombreuses autres spécialités et permet une prise en charge globale du patient en pluri-disciplinarité. Même si je me suis investie largement dans la thématique « diabète et grossesse » en collaboration avec l’équipe obstétricale dont la structure fait référence en France, j’ai gardé une activité importante de diabétologie générale (diabète de type 1, diabète de type 2 . …).

La diabétologie est une spécialité permettant une recherche translationnelle ayant pour but de mettre en place des protocoles de recherche sur la base rationnelle de résultats expérimentaux qui pourront être ainsi confirmés chez l’Homme. Elle permet de développer des recherches expérimentales pertinentes permettant d’explorer des problématiques médicales. En effet, la recherche translationnelle permet de mener une recherche dite « du malade au malade » mais passant par des études fondamentales et/ou expérimentales.

Pouvez-vous nous parler de vos projets au sein du Centre National PreciDIAB? En quoi ceux-ci vont permettre des avancées pour la recherche et la prise en charge des patients diabétiques?

Certains projets mis actuellement en place dans le cadre de PreciDIAB gravitent directement autour du patient diabétique. En effet, la réussite de ces projets passe tout d’abord par le recrutement de patients afin de les inciter à participer à ces cohortes* prospectives.

Un bon exemple est « PreciDIAB Heart and Brain » dont l’objectif est de prédire la dysfonction cardiaque et l’apparition des troubles cognitifs au cours du diabète de type 2. Cette cohorte permettra d’étudier les mécanismes impliqués dans l’immunomodulation cardiaque, la mécanique myocardique et la cognition.

Par ailleurs, nous participons directement à la réflexion de projets qui sont centrés sur l’institution comme le développement de stratégies de prévention de la iatrogénie* à l’aide de systèmes d’aides à la décision informatisée, notamment avec l’équipe du Pr Jean-Baptiste Beuscart. Le développement de ce projet va permettre de mieux détecter et corriger les situations à risque iatrogène et/ou nécessitant une optimisation thérapeutique chez les patients hospitalisés en lien avec l’ambulatoire* et le patient.

D’autres projets sont en cours de préparation comme le génotypage des patientes ayant un diabète gestationnel afin d’identifier celles les plus à risque de devenir diabétiques et nécessitant un suivi particulier. L’ensemble de ces projets permettront une meilleur compréhension des mécanismes impliqués au cours du diabète et seront très utiles dans le cadre de la prise en charge médicale, mais également pour la formation de tous les acteurs qui gravitent autour du patient.

Quelles sont les dernières grandes avancées concrètes pour les patients diabétiques et voyez-vous des perspectives futures porteuses d'un espoir nouveau?

L’apport des nouvelles technologies est une vraie révolution dans la prise en charge du patient diabétique de type 1 (pompe à insuline, mesure continue de glucose, télémédecine….). L’avancée majeure actuelle est la possibilité d’avoir une insulinothérapie optimisée par « boucle hybride ou fermée » (pompe à insuline, capteur de glucose et algorithme d’ajustement de l’insuline). Cette technologie est déjà applicable aux diabétiques de type 1 que l’on soit enfant, adolescent ou adulte avec d’excellents résultats en terme d’équilibre glycémique, de réduction du nombre d’hypoglycémie et d’amélioration de la qualité de vie. L’utilisation de ces technologies n’est possible que grâce à l’éducation thérapeutique qui fait partie du soin en diabétologie.

En ce qui concerne le diabète de type 2, l’arrivée de nouvelles classes médicamenteuses avec protection cardio-rénale est également une avancée majeure qui permettra de retarder et réduire la mortalité liée aux complications du diabète.
Ces perspectives nécessitent de continuer à mettre en place des projets de recherche clinique ou expérimentale que ce soit dans le cadre du diabète de type 1 ou de type 2.

Le Centre National PreciDIAB est pour les cliniciens une excellente opportunité de répondre aux nombreuses questions encore non résolues, grâce notamment à l’étude des variants génétiques. L’objectif est de favoriser le développement d’une véritable médecine de précision afin de permettre d’adapter le traitement des personnes porteuses de certains gènes dits « actionnables », afin de leur éviter des traitements lourds, contraignants, peu efficaces et couteux pour la société. Néanmoins la réussite de ces projets ne sera possible qu’au prix de la constitution d’une équipe de cliniciens avec profil défini faisant le lien entre les équipes fondamentales et les équipes cliniques, d’assistants de recherche clinique et de paramédicaux.

Nous avons donc mis en place une réunion mensuelle de présentation de dossiers de cas de « diabètes atypiques ». Ces réunions regroupent des experts de différentes disciplines avec pour objectif de déployer dans un cadre défini l’application réelle et concrète de la médecine de précision des diabètes au bénéfice des patients non répondant aux prises en charges habituelles. Je vous invite à lire « La Une » de cette newsletter pour en savoir plus.

Enfin, l’un de nos objectif est également d’attirer de jeunes cliniciens à la recherche en diabétologie grâce aux différentes équipes de recherche sur le site et de former une diabétologie d’excellence.

Cohortes : Les études de cohortes consistent à suivre dans le temps un groupe de personnes qui partagent des caractéristiques communes, afin d’identifier la survenue d’événement de santé d’intérêt (maladie ou dysfonctionnement de l’organisme).

Iatrogénie : effets indésirables provoqués par la prise d’un ou plusieurs médicaments.

Ambulatoire : (ou soins de ville) sont les soins effectués en cabinets de ville, dispensaires, centres de soins, lors de consultations externes d’hôpitaux publics ou privés, en cures thermales et les actes d’analyse en laboratoire. Ils sont dispensés par les médecins, dentistes et auxiliaires médicaux (infirmiers, kinésithérapeutes, orthophonistes, orthoptistes) au titre de leur activité libérale.

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Un blog consacré aux mille et une facettes du diabète.
Edité par Marc Gozlan, journaliste médico-scientifique